Marketing vs Comm : mon contenu, ma visibilité, mes leads

Discussion de tous les instants, la communication d’une entreprise n’en finit plus de s’affronter avec son confrère le marketing, perdant au passage du terrain, au point que les intitulés de postes prennent acte de l’évolution. Car le marketing de contenu est le nouveau fer de lance de la visibilité d’une entreprise, porté par des modèles d’affaires encore balbutiants et alimentés par l’économie de la publicité.

Mais les métiers s’accordent-ils sur une définition du contenu ? Traite-t-on de façon équivalente une landing page et un avis d’expert ? Qu’est-ce qui différencie une tribune libre publiée dans un grand quotidien d’un livre blanc ? N’est-ce pas simplement revenir au vieux débat du contenu entrant versus le contenu sortant ? Et dès lors, est-il si pertinent de les opposer ?
Avec Elisa Lesieur, consultante senior relations publics BtoB chez notre partenaire Yucatan, nous avons échangé à bâtons rompus sur ce sujet qui fait rage au sein des agences de presse et des agences de contenus comme la nôtre.

Élisa, ton métier consiste, entre autres, à renforcer la notoriété de tes clients (entreprises, marques, personnalités, produits). Quelles évolutions constates-tu ?

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Les relations publics exigent de bâtir une relation et de développer l’intérêt pour cette relation. Relations avec les journalistes bien sûr mais également avec des partenaires, des institutions, le monde des affaires ainsi qu’une myriade d’individus évoluant de près ou de loin dans l’écosystème du client. Une approche qui demande du temps.

Sur ce point nous rencontrons deux paradoxes. C’est un temps que beaucoup d’entreprises ne sont plus prêtes à donner. La demande a beaucoup évolué ces dernières années, vers des actions dont les résultats doivent être immédiatement perceptibles, notamment en termes de leads et donc de ROI.

Mais il faut aussi savoir résoudre l’équation entre un temps d’attention moyen en chute libre depuis les années 2000, des secteurs en disruption quasi permanente et des cibles influenceurs remis en question régulièrement. Il nous appartient de varier les canaux et les moyens de diffusion et d’adapter la présentation de l’information en conséquence.

Est-ce que cette tendance n’est pas le germe de l’opposition entre contenu entrant et contenu sortant ?

Si, en partie. Les budgets sont en effet plus contraints et les directions marketing et communication sont pressées de démontrer avec toujours plus de vigueur que leurs actions impactent très directement les ventes. Un article, un lead, c’est en substance l’attente plus ou moins exprimée. On attend donc beaucoup des algorithmes et du SEO, pour diriger l’acheteur directement vers le produit.

Or c’est oublier que l’achat (au sens large, abonnements et leasing inclus) en BtoB, et particulièrement dans l’IT revêt deux caractéristiques cumulées. D’une part, l’acheteur n’approche pas les services commerciaux ni ne se laisse approcher tant qu’il n’est pas suffisamment renseigné. En d’autres termes, c’est bien la capacité à créer un effet de masse autour d’un même sujet qui pourra créer la différence dans la prise de décision.

D’autre part, sur des engagements financiers aussi importants que le SaaS et le Cloud, (des décisions socialement impactantes également), l’acheteur doit pouvoir se rassurer, auprès d’expertises tierces. Le contenu en propre n’est définitivement pas suffisant. C’est à ça que sert la notoriété, on ne s’auto-légitime pas. Tout miser sur du contenu entrant coupe l’entreprise d’une part importante de son écosystème médiatique.

RP, marketing, comm : quelle serait l’attitude à adopter ?

Au même titre que l’omnicanalité du commerce a détrôné les ventes en silos, relations (aux) publics et marketing de contenu œuvrent ensemble. Les unes afin de consolider l’opinion publique vis-à-vis de l’entreprise, de ses services et de ses produits, l’autre s’appuyant sur une notoriété grandissante pour construire un ou plusieurs tunnels de conversion solides. A ce propos d’ailleurs, il faut oublier l’opposition entre contenus entrants et sortants et se concentrer sur l’amplitude que peut atteindre la conjonction de quatre modèles complémentaires : Owned media, Earned media, Shared media et Paid media forment un ensemble puissant pour la stratégie d’influence et de contenu d’une entreprise.

Mais quoi qu’il arrive, le plus important reste le message. Encore et toujours le contenu doit être à haute valeur ajoutée pour les cibles. Même les communiqués de presse, dont beaucoup prédisent le déclin, réalisentd’excellents scores d’ouverture quand ils donnent de l’information tangible, concrète, vraiment utile. Le dialogue vient ensuite. C’est pourquoi nous invitons toujours nos clients à se préparer aux interviews, et être en mesure de réagir rapidement aux sollicitations. Les supports sur lesquels faire passer le message, adapté pour le format, ne sont finalement que de l’outillage, choisis en fonction de l’objectif visé.

Un outillage au demeurant qu’il faut savoir maîtriser ?

Oui, la transformation numérique des relations publics passe par une nouvelle professionnalisation des acteurs de la filière. Nos outils évoluent et notre expertise technique s’enrichit. Nos préconisations aussi. La digitalisation des activités touche toutes les sphères d’activités et ses effets sont en cascade. Nous savons par exemple que les supports et les médias traditionnels n’ont pas fini de se chercher. Leur business model n’est pas fixé. La presse écrite se tourne vers l’événementiel, quand d’autres opèrent le chemin inverse. Le travail d’un consultant en PR est de savoir humer cet air du temps pour que ses préconisations fassent mouche.

Nos méthodes évoluent également. Nous faisons de plus en plus dans la dentelle quand il s’agit d’identifier de nouvelles sphères d’influence et les nouveaux formats qui leur correspondent. La démarche repose d’ailleurs sur un des fondements des PR, à savoir entretenir et alimenter de bonnes relations avec les relayeurs d’opinion. C’est une plus-value inestimable pour nos clients.